vendredi 12 août 2011

La Queue du scorpion

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Kurt Bauman, riche homme d'affaires, meurt dans l'explosion d'un avion de ligne, au dessus du Pacifique. Il laisse à sa veuve, Lisa, une assurance d'un millions de dollars. La jeune femme se rend en Grèce -où se trouve le siège de la société de son défunt mari- pour récupérer cette somme, en liquide. Quelques heures plus tard, elle est retrouvée assassinée dans sa chambre d'hôtel. L'argent, lui, s'est envolé.

Le deuxième giallo de Sergio Martino sort sur les écrans italiens huit mois après L'étrange vice de Mme Wardh, sa première incursion dans le genre. Edwige Fenech, initialement pressentie pour le rôle de Cléo Dupont, n'a pu se rendre disponible pour le tournage. C'est l'actrice suédoise Anita Strinberg qui interprète finalement la journaliste française enquêtant sur les meurtres. George Hilton, déjà présent au générique de Mme Wardh, rempile sous la direction de Sergio Martino pour incarner un détective employé par la compagnie d'assurance. "Dans ce film il a été très bon, ce qui n'était pas toujours le cas", balancera le réalisateur près de 30 ans plus tard*, "c'est sans doute dans celui-ci qu'il a été le meilleur".

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Ces qualités d'interprétation, et le fait qu'il soit tout de même considéré comme un titre phare de Martino, n'empêchent pas La Queue du scorpion d'être un ton en dessous de Mme Wardh. Des scènes ont dû être ajoutées pour porter la durée du métrage à une heure trente -au lieu de l'heure et quart qu'aurait donné le projet initial. Ces séquences, tournées à Londres, trouvent leur place au cours du premier quart d'heure. Du coup, l'intrigue tarde à démarrer et, lorsque l'on a une vision de l'ensemble du film, le caractère superflu de ces scènes ajoutées se fait criante.
Après le meurtre de Lisa (Ida Galli), le rythme s'accélère et le film parvient à accrocher l'attention. Parmi les scènes fortes, celle de l'assassinat de Laura (Janine Raynaud). Egorgée, elle se laisse glisser le long d'une vitre. Son visage, aplati contre le verre, prend une expression grimaçante qui confère une dimension d'une cruauté comique à la scène. Sergio Martino affirme que Quentin Tarantino et Jaume Balaguero lui ont confié que cette séquence les avait marqués.
La bande annonce de l'époque (voir ci-dessous) n'hésitait pas à mettre La Queue du scorpion au niveau du Golem, du Cuirassée Potemkine, de M, le maudit et de L'Âge d'or... Il ne faut pas non plus exagérer mais, sans être le chef d'oeuvre annoncé, La Queue du scorpion figure tout de même parmi les titres à recommander à tout amoureux de giallo.



* Interview réalisée par Daniel Gouyette et visible dans les suppléments du DVD édité par feu-Néo publishing, dans la collection Giallo.

La Queue du scorpion
(La Coda dello scorpione) Italie, 1971.
 Réalisé par : Sergio Martino. Avec : George Hilton, Anita Strindberg, Ida Galli...

jeudi 11 août 2011

Easy girl

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Olive prétexte un rendez-vous avec un garçon pour décliner l'invitation lancée par sa meilleure amie pour le week-end. Le lundi suivant, elle s'enfonce dans le mensonge en confiant à son amie avoir perdu sa virginité avec son rencard. Une information qui n'échappe pas aux oreilles indiscrètes et qui va rapidement faire le tour du lycée. L'ado lambda et passe-partout commence alors à exister aux yeux de ses congénères. Loin d'être échaudée par la tournure que prennent les choses, elle poursuit sur sa lancée en acceptant d'aider l'un de ses camarades gay à se faire passer pour hétéro en simulant une coucherie. Il n'en faut pas plus pour qu'on lui colle l'étiquette de "fille facile".

Résumé ainsi, le point de départ de cette comédie laisse redouter le pire. Pourtant, Easy Girl n'a pas grand chose à voir avec les potacheries libidinales à la American Pie et consorts. Même s'il est question de sexe, de "twat" et de chlamydiose, le film demeure chaste et fait preuve d'une certaine subtilité. C'est d'ailleurs du côté des comédies ados de John Hugues (The Breakfast club, Sixteen candles, La folle journée de Ferris Bueller...) -auxquelles il est clairement fait allusion- que le lien de parenté doit être recherché.

A cela s'ajoute une référence littéraire. Olive s'inspire du roman qu'elle étudie en cours, La lettre écarlate, pour provoquer les moralisateurs de tous poils qui l'entourent. Dans ce livre, dont l'action se déroule au XVIIe siècle, il est question d'une femme adultère que la communauté puritaine de Boston oblige à arborer -signe d'infamie- un A (pour adultère) rouge sur la poitrine. Ce qui donne l'idée à Olive d'accessoiriser ses tenues affriolantes avec la première de l'alphabet et de parcourir les couloirs du lycée, la tête haute. Le titre original, Easy A, joue d'ailleurs du double sens attaché à cette lettre.

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Faire la nique au puritanisme en s'appuyant sur le mécanisme de la rumeur sans oublier d'être drôle, voilà le programme de ce teen movie. Easy girl n'est pas hilarant de bout en bout, n'évite pas les redites et accuse quelques baisses de régime mais il se dégage de l'ensemble quelque chose d'extrêmement sympathique. Emma Stone est l'atout principal. Son Olive, prête à jouer les fausses ingénues, suscite une empathie immédiate et on rêverait de la voir rejoindre notre groupe d'amis.  Elle est entourée par de solides seconds rôles, dont certains que l'on n'a peu l'habitude de voir dans le registre comique : Malcom McDowell, Patricia Clarkson, Stanley Stucci, Lisa Kudrow...

Ne vous arrêtez donc pas à l'accroche racoleuse de la jaquette du DVD -"Mieux vaut être nue qu'inconnue !!"- et rencontrez sans tarder cette fille bien.



Easy girl
(Easy A) Etats-Unis, 2010.
Réalisé par : Will Gluck. Avec : Emma Stone, Amanda Bynes, Stanley Tucci...

mercredi 10 août 2011

L'étrange vice de Mme Wardh

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Alors qu'un tueur au rasoir sévit à Vienne, Julie Wardh et son mari arrivent dans la capitale autrichienne. Son époux étant très pris par ses affaires, la jeune femme passe surtout du temps avec son amie Carol et George, le cousin charmeur de cette dernière. Jean, l'un des anciens amants de Julie, est également dans les parages, décidé à lui faire savoir qu'il ne l'a pas oubliée.

L'étrange vice de Mme Wardh, a été influencé par L'Oiseau au plumage de cristal, le premier long-métrage de Dario Argento, champion du box-office italien quelques mois plus tôt. Si son scénario s'inscrit dans la lignée de celles des gialli des années 1960 - où la motivation du meurtrier s'avère essentiellement vénale - le film de Sergio Martino prend, avec son psycho-killer et ses fulgurances de violence, le train de la modernité amorcée par le premier essai argentien.

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Le titre intrigant renvoie au masochisme du personnage principal. Dans le rôle de Julie Wardh, Edwige Fenech, déploie toute sa sensualité. La première partie du film est baignée d'érotisme et les formes de l'actrice, largement dévoilées, n'y sont pas étrangères. Edwige Fenech, qui  a alors près d'une vingtaine de rôles à son actif dont un dans L'île de l'épouvante de Mario Bava, ne tardera pas à s'imposer comme l'une des divas du giallo. George Hilton, acteur argentin qui s'était jusque là surtout illustré dans des western spaghetti, se glisse dans le costume du principal rôle masculin, George. Le couple Fenech-Hilton est ainsi constitué pour la première fois sur grand écran ; ce ne sera pas la dernière et il deviendra l'un des duos emblématiques du genre.
L'intrigue, qui enchaîne les rebondissements sans craindre les excès dans sa conclusion, emprunte certaines des caractéristiques de deux chefs d'œuvre d'Henri-Georges Clouzot et d'Alfred Hitchcock. Les citer risquerait de spoiler le fin mot de l'histoire. Mais que l'ombre de ces grands noms recouvre le film donne une idée du suspense qu'a voulu échafauder -avec succès- Sergio Martino. Plusieurs scènes mémorables jalonnent le film. Celle du "verre pillé", onirique et sensuelle, celle du parking souterrain, mais surtout celle du parc. Une séquence qui en inspirera une autre de Quatre mouches de velours gris, de... Dario Argento.
L'étrange vice de Mme Wardh constitue une parfaite première approche du giallo. Et pour tous les amateurs du genre, le visionnage de cette pièce maîtresse est inévitable.




L'étrange vice de Mme Wardh
(Lo strano vizio della Signora Wardh) Italie, 1971.
 Réalisé par : Sergio Martino. Avec : Edwige Fenech, George Hilton...