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Haut la main, Le Complexe du castor pourrait emporter le prix du pitch WTF de l'année. « Walter, quinqua suicidaire, tente de surmonter sa dépression en communiquant uniquement au travers d'une marionnette de castor dénichée dans une benne à ordure » Etonnant, non ? Suffisamment pour se retrouver dans la Black List de 2009, cette fameuse enquête qui distingue chaque année les scénarios les plus plébiscités à Hollywood sans qu'ils soient pour autant entrés en production. Forcément, s'il est aujourd'hui sur les écrans c'est qu'il a trouvé preneur. Un temps, Jay Roach (Mon beau père et moi...) s'y est intéressé, en imaginant Jim Carrey dans le costume trois pièces de Walter. Puis, David O. Russel (Les rois du désert, Fighter...) s'en est approché avant de tourner le dos : trop risqué. Ce qui laissait le champ libre à Jodie Foster, emballée par le projet dès qu'elle en a eu vent. Un coup de fil à son vieux pote Mel Gibson et, 24 heures, soit une lecture de scénario, plus tard, la tête d'affiche était trouvée. Grosso modo, c'est ainsi que les choses se sont déroulées.
Manque de bol, comme si le script n'était pas en lui-même suffisamment périlleux, les déboires de l'acteur principal ont corsé la post-production. 2010, annus horribilis pour Mel Gibson. Sa trogne a trusté les une des tabloïds après que son ex-compagne a rendu public des enregistrements téléphoniques. On y entendait la star déverser de violentes menaces envers elle entre deux propos racistes. Face à la justice, il s'en tirera avec trois ans de mise à l'épreuve et une injonction à suivre un programme de gestion de la violence. Evidemment, pour la promo, ça la fout mal. Du coup, la sortie du Complexe du castor, initialement prévue l'an passé, a été repoussée à maintes reprises.
Cette gestation chaotique ajoute à la singularité de ce film bancal et désarçonnant. L'argument de départ laisse présager une comédie grossière, mais cela ne colle pas avec une Jodie Foster derrière la caméra. Résultat, la première partie est teintée d'humour, mais c'est l'amertume qui prédomine, comme dans le Mister Schmidt, d'Alexander Payne. Et puis, brusquement, le ton se fait encore plus sombre, plus inquiétant, plus violent. La marionnette trop mignonne devient trop flippante. On se délecte de voir la comédie familiale dégénérer en délire psychotique. Malheureusement les bons sentiments finissent par ressurgir avec une énième scène de discours en public où on dit des trucs 'ach'ment importants sur le sens de la vie qui font réfléchir à notre condition d'être mortel.
Malgré cette réserve, Le Complexe du castor est une excellente surprise. Mel Gibson ne se ramasse jamais, malgré son rôle casse-gueule. Lui que l'on n'avait pas vu aussi convainquant à l'écran depuis longtemps (depuis quand, d'ailleurs ?) reste debout qu'il surfe sur le registre humoristique ou sur une partition plus émotionnelle. Un dernier mot sur l'intrigue secondaire qui révèle le talent d'Anton Yelchin -qui joue le fils de Walter- et permet de retrouver Jennifer Lawrence (Winter's bone), en pom-pom girl intello. Ce versant sentimental, certes un brin convenu, contribue à rendre ce film particulièrement attachant.
(The Beaver)
Etats-Unis, 2011.
Réalisé par : Jodie Foster. Avec : Mel Gibson, Jodie Foster, Anton Yelchin, Jennifer Lawrence...
Attachant ? C'est tout sauf attachant, c'est quasi-détestable tellement c'est con. Sur ASBAF on l'a débranlé http://www.asbaf.fr/2011/05/mel-gibson-est-pere-castor.html
RépondreSupprimer"Quasi-détestable tellement c'est con" : mieux vaut réserver l'argument aux films de Gaspar Noé. Mel Gibson ne m'a jamais paru sympathique, mais dans ce film, j'ai réussi à faire abstraction de tout ça. Après, c'est sûr, "Le complexe du castor" est filmé platement, ce n'est pas un monument du cinéma mais l'ensemble est assez curieux et mérite que l'on s'y arrête.
RépondreSupprimer"convaincant" ;-)
RépondreSupprimerEt j'aime beaucoup le film aussi...